Thèse de doctorat en histoire et en romanistique, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et Martin-Luther Universität Halle-Wittenberg, préparée sous la direction d’Annette Wieviorka (UMR SIRICE) et Dorothee Röseberg (Martin-Luther Universität Halle-Wittenberg) et soutenue le 16 décembre 2016:
« Représentation de l’Allemagne et des Allemands chez d’anciens concentrationnaires en France (1945-1975) »
Résumé
Par le biais de l’étude des perceptions (Perzeptionsforschung) et de l’analyse du discours, cette thèse se propose de cartographier l’imaginaire lié à l’Allemagne et aux Allemands chez les anciens déportés en France entre 1945 et 1975. Elle entend démontrer que ce ne sont pas l’expérience concentrationnaire et ses séquelles, mais l’appartenance de ces survivants à différents groupes sociaux ainsi que les valeurs et orientations de ceux-ci qui ont déterminé leurs représentations des voisins d’outre-Rhin. Ainsi, cette expérience particulière n’aura pas généré chez les rescapés des camps de concentration de représentations inédites de l’Allemagne et des Allemands, ni du nazisme et des nazis. Néanmoins, les transformations sociales et politiques en France et en Allemagne au cours des deux décennies d’après-guerre ainsi que l’évolution des relations entre ces deux nations ont contribué à la création de plusieurs schémas qui leur sont propres. Il s’agit d’une part d’un modèle d’interprétation distinguant Allemands et nazis et d’autre part de deux topoi mettant en lien la mémoire des crimes nazis et l’attitude vis-à-vis des Allemands.
Ainsi, cette thèse permet de réfléchir non seulement à l’impact des discours circulant au sein d’un groupe social et de la société, mais aussi au contexte de la création, de la modification et de la disparition d’images d’autrui. En outre, ces interrogations éclaircissent les liens entre l’expérience du passé, la perception du présent et les attentes pour l’avenir.
Enfin, ce travail se propose de montrer que l’analyse de perceptions et de représentations ne doit pas être une fin en soi, mais qu’elle est indissociable de l’étude des groupes et des individus qui les véhiculent et les expriment.