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Le nucléaire, au cœur du pivot russe de Viktor Orban - intervention de Paul Gradvohl / France Culture

Autrefois atlantiste au point de regretter, lors du conflit russo-géorgien en 2008, que l’OTAN ne soit pas étendue à l’Ukraine, le premier ministre hongrois Viktor Orban a depuis misé sur les puissances orientales, chinoises, turques et russes...

Avec Paul Gradvohl, historien, professeur à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, spécialiste de la Hongrie

Depuis le début de la guerre en Ukraine, la Hongrie a soutenu les neuf séries de sanctions de l’Union européenne contre la Russie et a accueilli plus de 2 millions de réfugiés ukrainiens. Mais le pays est une voix dissidente en Europe et Viktor Orban, Premier ministre depuis 2010 est déterminé à maintenir de bonnes relations avec Moscou. À ce titre, Budapest a refusé de laisser passer des armes par le territoire hongrois vers l’Ukraine, avant d’esquiver l’application de sanctions contre le pétrole et le gaz russe arguant que l’économie hongroise ne peut pas fonctionner sans eux. Au contraire, les liens entre les deux pays se sont renforcés ces derniers mois avec la poursuite de la construction de la centrale nucléaire de Paks, un projet financé en grande partie par le géant russe Rosatom.

Un ajustement idéologique sur fond de contrat nucléaire

Ce contrat sur le nucléaire signé par Viktor Orban illustre de quelle façon le destin de la Hongrie est désormais lié à la Russie, alors même que Budapest observait un positionnement atlantiste jusqu’en 2008. Au moment de la guerre de Géorgie, le Premier ministre hongrois condamne fermement l’agression et se déclare en faveur de l’intégration de l’Ukraine dans l’OTAN face aux velléités russes qui remettent en cause la souveraineté des territoires de Kiev. Mais prenant conscience que rien n’arrêtera la machine russe, il est rapidement persuadé de deux choses : les Occidentaux ne feront rien pour freiner la Russie, et la crise financière signe la fin de la domination économique des Etats-Unis, annonçant un nouvel ordre mondial polarisé à l’Est. Ce nouvel ordre mondial est centré sur la Russie, mais aussi, et surtout, sur la Chine.

Dès 2009, encore candidat au poste de Premier ministre en Hongrie, Viktor Orban se rend en à Saint-Pétersbourg, avec des hommes d’affaires hongrois. Il rencontre Poutine et les classes dirigeantes des deux pays se mettent d’accord pour faire des affaires ensemble. Et c’est à ce moment que sont posés les premiers jalons du contrat de la centrale nucléaire de Paks avec Rosatom, dont les termes restent inconnus. La position de Viktor Orban sur la guerre en Ukraine est justifiée par sa conviction que l’Ukraine ne peut pas résister durablement à l’invasion. Dans une récente interview à la presse étasunienne, il rappelait que Vladimir Poutine ne pouvait pas perdre cette guerre, allant jusqu’à comparer l’Ukraine à un No Mans Land comparable à l’Afghanistan et concluant que la Hongrie se tenait du bon côté de l’Histoire.

La Russie comme levier de politique intérieure pour Viktor Orban

L’engagement est donc très clair vis-à-vis de Moscou. D’autant plus que le financement de ses campagnes politiques est directement lié au contrat pour la 2e tranche de la centrale nucléaire de Paks. Ce contrat est une véritable caisse noire pour les campagnes politiques d’Orban. Dès le départ, les négociations se sont faites dans l’opacité, Budapest a exigeant de garder les détails du contrat comme un secret, notamment sur les modalités prévues pour la sous-traitance.

Pour aller plus loin

https://urldefense.com/v3/__https://calendar.boell.de/fr/event/mechanisms-democratic-deconsolidation-what-lessons-can-be-drawn-hungarian-trajectory__;!!B6IQPYr2rLEU!WS3G9gGtw5DsvmdzGgI6A4S00TxN3mPcMTPB7vfGwf3YwcCoK0nqMQaj8TBEZZm5dztJQtt-BT1y3_tielZX7C12LZ3Wu7Gt_kpVWig$

Type d'intervention : 
Lieu : 

France Culture

Participant(s) : 
Date : 
Thursday 09 February 2023 - 07h40